Le journalisme web en plein boum en Méditerranée

Organisée par le Club de la presse dans le cadre de la Semaine économique de la Méditerranée, cette conférence s’est interrogée sur la place des médias et de la diffusion de l’information dans le développement numérique au sud de la Méditerranée. 


Cette thématique rassemble des experts et journalistes du pourtour méditerranéen, des médias, réunis pour évoquer les promesses d’une Méditerranée interconnectée.

Comment la Méditerranée se positionne-t-elle dans un contexte où le numérique ouvre ses frontières territoriales ? C’est la question posée par le Club de la presse aux intervenants de cette conférence ; M. Ishane El Kadi, journaliste et directeur de Maghreb Emergent et M. Samir Belhassen, rédacteur en chef et community manager de Tunisie-Tribune.com.

L’adoption du journalisme online n’est pas un choix par défaut pris par les médias maghrébins, mais plutôt une réponse stratégique à des dynamiques environnementales externes. Bien que retardée, l’adaptation au développement numérique dans les pays sud méditerranéens est en pleine effervescence. « L’accès au Web Mobile en Algérie ne s’est effectué qu’à partir de janvier 2015 », souligne Ishane El Kadi, soit 7 ans après l’Europe. Néanmoins, journalistes comme éditeurs, migrent de plus en plus de la presse papier vers la presse numérique. En effet, au tournant du printemps arabe, l’espace géopolitique a ouvert les portes à de nouvelles formes d’expression et, ainsi, de liberté de presse.

Pourquoi alors un tel engouement pour la presse en ligne ? 

« L’Internet en Algérie, est un espace de liberté » qui inhibe les pressions politico-bureaucratiques et les frais d’impression du papier, explique Ishane El Kadi. Touchée par la crise économique, l’édition papier se transforme pour adopter une forme plus moderne, accessible et gratuite, qu’est l’édition numérique.

« La presse numérique est également une solution au décalage et au renouvellement des informations, qui peuvent poser problème en matière de presse papier », précise Samir Belhassen. « On ne court plus derrière l’information », ajoute-t-il, la rapidité de renouvellement des données est rendue plus efficace par le web.

La libéralisation de l’expression promeut aussi le Maghreb et son marché. L’ambition de Samir Belhassen est « d’aller vers la construction du grand Maghreb », vecteur de progrès économique, politique et social dans un environnement plus interconnecté. Ce dessein s’avère difficilement réalisable faute de contraintes gouvernementales, financières, sociales, légales et législatives. Au Maroc, cet « espace de liberté » qu’est Internet est perçu par les instances politiques comme une pression forte, ces dernières voulant à tout prix contrôler l’information diffusée en adoptant de nouvelles lois et visant d’autres stratégies. Qui plus est, pour revenir en Algérie la législation persiste à mettre de côté la presse numérique dans le champ médiatique. La reconnaissance du statut de journaliste web demeure encore inconnue.

Intervient également le souci de la fiabilité de l’information. Le décalage entre les informations vérifiées basées sur de vraies sources, et des « fausses informations » ou « scoops », accentue d’autant plus la volonté politique de contrôler les médias électroniques. Les réseaux sociaux procurent l’accessibilité à de nombreuses sources, dont la part de vérification des informations traitées est ambiguë voire même absente. De plus, il y a une « asymétrie entre une population informée et l’autre non », déplore Ishane El Kadi. Le public numérique est friand d’informations faciles à comprendre, « le lectorat n’aime plus lire », se plaint Samir Belhassen.

Quel est alors l’avenir de la presse au Maghreb ? 

L’environnement économique semble être le fondement primordial pour promouvoir un échange médiatique entre pays et, ainsi, créer un Maghreb plus soudé et interconnecté. « L’avenir [du Maghreb] dépend des ressources financières », affirme Samir Belhassen. La lutte pour l’obtention des droits étatiques, de subventions politiques et de promotion du métier de web journaliste, est un enjeu auquel les pays maghrébins devront se confronter. La construction du « grand Maghreb » médiatique suivra le chemin pris par le développement numérique, tout comme celui choisi pour la liberté d’expression.

Source de l'article l'OCEMO

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