Au Maroc, la corruption et la main d'oeuvre pas suffisamment formée minent le climat des affaires

Si le Maroc peut se targuer d'être l'un des rares pays de la région MENA où l'instabilité politique ne figure pas en tête des principales entraves au climat des affaires, il n'en est pas de même pour la corruption.

CORRUPTIONSelon un rapport publié cette semaine par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la Banque européenne d’investissement (BEI) et la Banque mondiale (BM), sur les principaux freins au développement du secteur privé dans huit pays de la région MENA (Moyen-Orient/Afrique du Nord), les entreprises marocaines perçoivent la corruption comme l’entrave la plus importante au climat des affaires.

Pots-de-vin

21% des entreprises marocaines estiment que la corruption est le premier frein, contre seulement 8% en moyenne pour les autres pays étudiés dans le rapport (à savoir la Cisjordanie et la bande de Gaza, Djibouti, l’Égypte, la Jordanie, le Liban, la Tunisie et le Yémen). Et pour cause: le Maroc affiche l’une des intensités de corruption les plus élevées parmi les économies couvertes par l’enquête, soit 30% (contre 21% en moyenne pour le reste de la région).

Par "intensité de la corruption", le rapport note qu'il entend "le pourcentage de transactions dans le cadre desquelles il est demandé à une entreprise de verser un pot-de-vin ou attendu de sa part qu’elle en verse un au moment de la sollicitation de services publics, de permis ou de licences". On apprend ainsi que 37% des entreprises marocaines ont fait l'objet d'au moins une demande de versement de pot-de-vin, soit un taux supérieur à la moyenne des autres pays (24%).

Pour lutter contre la corruption, qui mine également le secteur public, le ministère de la Fonction publique et de la modernisation de l’administration débloquera, jusqu'en 2025, 1,8 milliard de dirhams, soit une moyenne annuelle de 180 millions de dirhams pour ce plan stratégique étalé sur dix ans.

Manque de formation

La corruption n'est pas le seul obstacle au développement du secteur privé. En deuxième position arrive la main-d’œuvre insuffisamment formée, selon 13% des entreprises marocaines interrogées. Le rapport indique ainsi que "le taux brut d’inscription dans l’enseignement supérieur n’atteint que 16% de l’ensemble de la population en âge de suivre des études supérieures, un taux médiocre par rapport aux 30% enregistrés dans l’ensemble des économies couvertes par l’enquête" dans la région MENA.

Néanmoins, le Maroc marque un point en terme d'intensité de la formation proposée par les entreprises: c'est l'un des pays étudiés où celle-ci est la plus forte, avec 26%% des entreprises qui proposent une formation "en bonne et due forme" indique le rapport, contre une moyenne régionale de 17%.

Parmi les autres entraves majeures au climat des affaires figurent, dans l'ordre décroissant, les pratiques des concurrents dans le secteur informel, l'accès aux financements, le taux d'imposition, l'instabilité politique, les douanes, les affaires judiciaires, l'administration fiscale et enfin, les transports.

Des prêts facilités

La BERD, la BEI et la BM indiquent toutefois que le Maroc affiche l'un des niveaux de profondeur du système financier les plus élevés de la région. C'est aussi l'une des deux seules économies régionales à disposer de bureaux de crédit "pleinement opérationnels". "D’une manière générale, l’intermédiation financière semble bien fonctionner au Maroc. 21% des fonds de roulement et des investissements sont financés par l’intermédiaire de banques", note le rapport.

Le royaume compte aussi la proportion la plus élevée d’entreprises non exposées à des contraintes de crédit (87% contre 73% en moyenne pour les économies couvertes par l’enquête). Par ailleurs, peu d’entreprises marocaines sont découragées de solliciter un prêt (10 % seulement).

Attrait des capitaux étrangers

Autre point positif pour le climat des affaires au Maroc: l'arrivée de capitaux étrangers. Le Maroc figure en effet parmi les économies régionales étudiées où la proportion d’entreprises manufacturières exportatrices à capitaux étrangers est la plus grande (27% contre 15% en moyenne pour les autres pays).

"Cette situation peut s’expliquer, au moins partiellement, par la stabilité politique du pays, sa capacité à attirer des investisseurs étrangers et sa proximité avec l’Europe", note le rapport.


Selon le classement "Doing Business" publié en octobre dernier par la Banque mondiale, qui mesure la qualité et l'efficience du cadre réglementaire dans 189 pays, le Maroc occupe le 75e rang et gagne cinq places par rapport à l’édition précédente. Le magazine américain Forbes avait pour sa part placé fin décembre le royaume au 62e rang des pays où il fait bon faire des affaires, sur un total de 144 pays étudiés.

Par Anaïs Lefébure - Source de l'article Huffpostmaghreb

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