Le Maghreb célèbre la Journée internationale de la Femme


Alors que le Maghreb célèbre une nouvelle Journée Internationale de la Femme, les militants font le bilan des progrès réalisés dans le domaine des droits de l'Homme.

[AFP/STR] Les Marocaines s'étaient rassemblées pour dénoncer le suicide d'Amina al-Filali, qui avait été obligée d'épouser l'homme qui l'avait violée.Alors que les appels à l'amplification des réformes se multiplient, les activistes des droits de l'Homme de tout le Maghreb célèbrent, le vendredi 8 mars, la Journée Internationale de la Femme.
Au Maroc, comme partout ailleurs, cette journée est l'occasion de faire le bilan des résultats obtenus et des obstacles qui restent à surmonter.
Rabiaa El Mofti, avocate et militante des droits de l'Homme, dit à Magharebia que la situation reste décevante : "Concernant le marché du travail, il y a encore des inégalités claires entre les hommes et les femmes au Maroc, que ce soit en termes de salaire ou d'alphabétisme".
Même si le nombre de femmes au Parlement a augmenté de 6 % depuis les élections législatives de 2007, la représentation des femmes reste en-deçà des espérances, indique Fatima Sadiqi, maître de conférences et chercheuse.
Elle souligne qu'il n'y a qu'une seule femme appartenant au cabinet présidentiel, seulement quelques-unes dans les organismes exécutifs des partis politiques et 10 % de femmes à des postes administratifs à responsabilités.
Mais parmi toutes les doléances soumises par les féministes, de nombreux activistes se montrent particulièrement critiques face à l'incapacité de la loi marocaine à soutenir le développement social et à mettre en oeuvre les normes internationales portant sur la protection des mineures.
Le suicide, l'année dernière, d'Amina al-Filali, âgée de 16 ans, qui avait été forcée d'épouser son violeur, est un souvenir encore frais dans de nombreuses mémoires. Conformément à l'article 475 du Code Pénal marocain, l'homme qui l'avait agressée a échappé à toute poursuite judiciaire en l'épousant.
"Cet article est maintenant sur le point d'être amendé et des condamnations sont envisagées, elles pourront s'élever pour les violeurs jusqu'à 30 ans de prison", a répété le ministre de la Justice Mustafa Ramid.
De nombreux groupes de défense des droits de la Femme réclament de même l'interdiction du mariage des mineures. Selon les chiffres officiels, le nombre de cas a augmenté, passant de 30 000 en 2008 à plus de 35 000 en 2010. Plus de 10 % des femmes marocaines se marient avant l'âge de 18 ans.
"La place d'un mineur est à l'école et nulle part ailleurs", affirme Rachida Tahri, membre du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS).
La ministre de la Solidarité Bassima Hakkaoui a assuré qu'un projet de loi en cours d'élaboration se concentrait sur la lutte contre toutes les formes de discrimination. Pendant ce temps, en Tunisie, les militants des droits de la Femme ont été indignés par une déclaration provocante faite par un religieux du Golfe.
Après une visite réalisée le mois dernier dans une maison close de Sousse, un sheikh du Bahreïn, Hassan al-Husseini, a posté une vidéo sur YouTube dans laquelle il a lancé une campagne pour "sauver les Tunisiennes de la prostitution". Ce religieux a supervisé une campagne similaire visant à la collecte de dons au Bahreïn et dans le Golfe.
Cette campagne intitulée "Osturni" ou "Préservez-moi" a indigné un grand nombre de Tunisiens, certains dénonçant la campagne menée sur Facebook, qui, selon eux, fausse l'image des Tunisiennes.
"C'est incroyable que ce sheikh - après avoir visité un bordel en Tunisie - ait lancé une campagne pour "sauver les Tunisiennes". Cela veut dire que c'est l'honneur de près de 5 millions de Tunisiennes qui est en jeu", commente Rania Laswed.
Le prêcheur bahreïni a répondu aux critiques sur Facebook, en disant : "Je vous demande une chose, j'écoute tout le monde, même ceux qui sont différents de moi, mais je vous prie d'offrir une critique constructive et d'utiliser les mots appropriés".
Ce problème a fait éclater au grand jour l'inquiétude de certaines Tunisiennes qui craignent un amenuisement de leurs droits sous la gouvernance islamiste.
"L'autorisation donnée à ces radicaux par le parti islamiste au pouvoir de venir en Tunisie et de dénaturer l'image des Tunisiennes nous fait craindre de perdre ce que nous avons gagné depuis l'indépendance", explique à Magharebia Marwa Chaibi.
"Aujourd'hui, nous appelons à rester ferme face à ce militantisme et nous demandons à ce que les droits des femmes soient inclus dans la nouvelle constitution, celle que nous attendons depuis si longtemps", ajoute-t-elle.
En Algérie, les activistes utilisent la Journée Internationale de la Femme pour faire le point sur les progrès qui ont été réalisés. La ministre de la Solidarité, Souad Bendjaballah, a suggéré le 5 mars que le pays crée un ministère exclusivement consacré aux femmes.
Cette suggestion a été faite durant une réunion portant sur le renforcement du rôle des femmes en politique, organisée par le Parlement algérien pour marquer la Journée Internationale de la Femme.
Bendjaballah a appelé les leaders algériens "à offrir aux femmes l'opportunité d'assumer des postes à responsabilités". "Une fois engagées, les femmes pourront prouver qu'elles sont à la hauteur de la tâche", a-t-elle affirmé.
"L'Algérie ne pourra pas accélérer le rythme du développement ni se libérer des chaînes de la régression et de la dépendance si la moitié de sa société reste paralysée et privée de participer à la promotion et au développement du pays", a pour sa part déclaré mercredi le président de l'Assemblée Populaire Nationale (APN), Mohamed Larbi Ould Khelifa.
Par Hassan Benmehdi à Casablanca, Yasmine Najjar à Tunis et Fidet Mansour à Alger pour Magharebia
Source de l'article Magharebia

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