Méditerranée - L’Égypte, plus grande bénéficiaire des Accords d’Agadir

Les accords de libre-échange entre le Maroc, la Tunisie, la Jordanie et l’Égypte ont permis une augmentation, entre 2007 et 2008, de 45% des échanges commerciaux. Mais c’est ce dernier pays qui semble avoir les meilleures performances, avec une augmentation de 115% de ses exportations et de 131% de ses importations avec ses trois partenaires.
Originellement nommé Accord Arabo-Méditerranéen de Libre Échange, les Accords d’Agadir ont été initiés en 2001, afin de développer le commerce entre ses pays membres, de favoriser le développement et l’intégration économique de la zone et d’attirer les investissements directs étrangers (IDE) européens et internationaux.
Ils se concentraient alors sur deux secteurs d’activité, textile et automobile, et s’élargissent depuis aux secteurs du cuir et du transport.
Supportée par l’Union Européenne, cette initiative a été signée en 2004 puis est entrée en vigueur en 2007. Forcément liés par le commerce à l’Europe, les pays membres ont décidé de laisser les portes de cette nouvelle zone ouvertes à tous les pays arabes méditerranéens qui jouissent d’un Accord d’Association avec l’Union Européenne, ce qui n’a pas encore été le cas, malheureusement pour ceux qui n’en font pas partie, vu les bonnes performances de la zone.
Un accord productif pour tous ses membres
De l’avis de Rania Nabil, responsable des Accords d'Agadir au Ministère du commerce et de l'industrie d’Egypte, d’ores et déjà «tous les États membres des Accords d’Agadir ont bénéficié significativement de l’accord.»
Et les chiffres le montrent. Chacun des volumes d’import-export des quatre pays a augmenté, permettant à certains de réduire une balance négative, et aux autres de d’augmenter leur balance positive.
Tout le monde semble gagnant, et pour cause, les échanges sud-sud sont un vecteur de croissance en ce début de XXIème siècle. Si l’on ajoute à cela la proximité et les possibilités qu’offre la première puissance commerciale de la planète, à savoir l’Union Européenne, on comprend mieux l’intérêt des Accords d’Agadir.

Les raisons du succès
Alors que l’Union pour la Méditerranée (UpM) ne brille pas par ses avancées, les Accords d’Agadir se concentrent sur une progression prosaïque, bien que limitée à quatre pays. L’idée est de développer progressivement les Accords, en se fondant sur des possibilités de développement réalistes et limitées, ce qui n’est pas sans rappeler la fameuse «politique des petits pas» européenne.
Ainsi, plutôt que de déplorer le fait que les échanges commerciaux entre les pays arabes aient été fort limités (4 à 6%, selon le site d’information «econostrum»), les quatre États membres ont misé sur ce réservoir de croissance.
Ils ont misé, et gagné, grâce à cette stratégie coopérative, ce qui constitue la première raison du succès des accords.
Il faut également compter, pour Rania Nabil, avec ce qui est le point «le plus distinctif dans les Accords d’Agadir», à savoir «le principe d’accumulation, qui offre aux États membres la possibilité d’accumuler avec les autres pour exporter vers l’Union Européenne.»
Cette possibilité permet un principe égalitariste parmi les pays membres, permettant à chacun de bénéficier des capacités particulières de production, de transformation et d’exportation de ses partenaires, dans certains secteurs. Comme l’explique par exemple Mme Nabil, «l’Égypte se distingue dans le secteur du cuir et de la tannerie, la Tunisie dans les chaussures et les produits finis à base de cuir.»
Une troisième raison est certainement le fait que les Accords d’Agadir ont permis à la Jordanie et à l’Égypte de voir s’ouvrir à eux les portes du libre échange avec l’Union Européenne, grâce à la possibilité de modification des règles d’origine qui lient l’Union Européenne à ses partenaires commerciaux.
Enfin, le fait qu’aient été établies des normes commerciales euroméditerranéennes est indubitablement une partie du succès des Accords. Le «certificat Euromed» permet en effet d’identifier un produit élaboré dans la zone, ce qui facilite les échanges. Cette règle a été annexée au texte fondateur des Accords.

L’Égypte, meilleur élève
Très diplomatiquement, Rania Nabil préfère insister sur les bonnes performances collectives des «quatre d’Agadir» plutôt que de tomber dans le chauvinisme. Pourtant, son pays arbore les meilleures performances. Insistant sur les multiples avantages qui s’offrent autant à l’Égypte qu’à ses partenaires, elle esquisse tout de même une piste, celle de l’importance du marché égyptien.
En effet, «en plus des autres avantages offerts par les Accords, l’Égypte est un large marché avec une population de 80 millions de personnes, ce qui permettra des opportunités de croissance dans de nombreux secteurs.»
Se refusant à commenter les performances moins impressionnantes, bien que tout à fait positives des autres pays, Mme Nabil insiste sur le volontarisme égyptien: «La partie égyptienne travaille à lever tous les obstacles qui se dressent face au développement des échanges commerciaux entre l’Égypte et les pays signataires d’Agadir.»
Enfin, et c’est là un point important du succès égyptien, elle reconnait également que «l’Égypte a un avantage comparatif dans les deux secteurs concernés, et spécialement dans le textile.»
Large marché, volontarisme et avantages commerciaux, voici donc certainement les raisons des excellentes performances de l’Égypte qui a vu plus que doubler à la fois ses importations et ses exportations avec les pays de la zone.
Mais Rania Nabil a certainement raison d’être humble et d’insister sur l’aspect coopératif des Accords d’Agadir. D’abord parce que l’ouverture à d’autres secteurs d’activité favorisera demain peut-être un peu plus ses partenaires. Mais surtout car c’est avant tout grâce à cet aspect coopératif que l’Égypte, comme ses pays partenaires, profite de ce pacte gagnant-gagnant.
Si chaque pays membre peut progresser individuellement, c’est en effet essentiellement parce qu’il s’ouvre activement à ses partenaires.
Par Julien Théron - Eurojar.org -
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