L’Algérie et l’Union pour la Méditerranée

C’est sans hésitation que l’UE a décidé de prolonger le processus de Barcelone sous une nouvelle dénomination : l’Union pour la Méditerranée. Qui dit prolongement, dit également mêmes moyens, mêmes objectifs et donc même stratégie et même vision. Le contenu du projet de l’UPM confirme ces assertions, d’où l’adhésion des deux rives de la Méditerranée, à l’exception de la Libye, à ce projet, car, il n’est pas suscité pour bouleverser mais pour faire perdurer une situation qui est synonyme d’immobilisme. L’analyse du contexte de cette position invariable permet de mieux cerner les tenants et les aboutissants de la politique méditerranéenne de l’Europe. Elle permet également de mieux éclairer la position de l’Algérie vis-à-vis, en particulier, du projet de l’UPM.
I. Le contexte
Durant la guerre froide, la rive sud de la Méditerranée a constitué un enjeu considérable pour les deux blocs antagonistes.
Le conflit israélo-arabe, l’existence de richesses pétrolières, entre autres, et la position géostratégique du flanc sud ont constitué les soubassements des rivalités entre les deux principales superpuissances de l’époque. Cependant, à l’époque déjà, des lignes de démarcation étaient nettes entre le nord de la Méditerranée riche et soumis aux Etats-Unis dans leur lutte contre l’autre bloc rival et le sud, pauvre et en lutte perpétuelle contre l’expansionnisme et les pulsions agressives d’Israël qui représente l’allié de l’Occident dans une région s’étendant de la Méditerranée au Moyen-Orient.
A l’exception d’Israël qui est un élément fondamental du dispositif occidental, les pays du sud de la Méditerranée ont opté pour la neutralité positive en intégrant le mouvement des pays non alignés. Bien entendu, chaque pays pouvait avoir des sympathies ou des centres d’intérêt pour un bloc, mais globalement, le non-alignement primait pour éviter que la zone méditerranéenne ne devienne un champ clos de la confrontation.
Les relations entre les deux rives de la Méditerranée étaient intenses et touchaient tous les domaines. Des relations traditionnelles imposées par l’histoire mais aussi par la géographie et l’économie. Par conséquent, le plus important pour l’Europe est de les maintenir afin de soustraire les pays du sud de la Méditerranée à l’influence décisive, voire à la « mainmise » du bloc soviétique.
En un mot, l’intérêt de l’Europe pour les pays riverains du sud était dénué de toute ambition. L’Europe n’avait ni projet cohérent ni vision pour aboutir à une communauté des destins. Elle n’avait pas créé dans son proche voisinage une dynamique qui aurait débouché sur des interdépendances prometteuses, d’autant plus que toutes les conditions étaient réunies : complémentarité économique entre les deux rives, ressources naturelles et énergétiques et marchés conséquents et donc porteurs de synergie. L’Europe avait superbement ignoré tous ces aspects car ses centres d’intérêt étaient manifestement ailleurs. Puis, quel intérêt pourrait représenter ces nouveaux Etats qui venaient tout juste de s’affranchir des griffes du colonialisme européen ? Ils étaient naturellement dépendants de l’Europe qui ne leur offrait que des accords de coopération pour perpétuer des liens inégaux.
D’ailleurs, l’Allemagne fédérale avait les yeux rivés sur l’Est surtout la RDA qu’elle espère un jour récupérer dans le giron national, le Sud ne cadrait donc pas avec sa vision stratégique. Malgré son poids en Europe, la France n’avait pu lui imposer une politique méditerranéenne que soutenaient également l’Espagne et l’Italie. L’Europe se caractérisait donc par un désintérêt manifeste à l’égard du flanc sud de la Méditerranée.
Cette approche contraste avec celle suivie, par exemple, par le Japon qui a réussi à susciter une aire d’influence ou les Etats-Unis avec le Canada et les pays d’Amérique latine. Cette toile de fond permet de comprendre les bouleversements qui ont suivi la chute du mur de Berlin et surtout le changement de stratégie de l’Europe vis-à-vis du sud de la Méditerranée. La disparition du bloc soviétique a permis à l’Allemagne de se réunifier et aux pays de l’Est d’intégrer progressivement l’Union européenne.
Cette étape ayant été franchie avec succès, il fallait se préoccuper du sud de la Méditerranée. Paradoxalement, l’impulsion est venue du nord et non du sud de l’Europe. En effet, le dialogue Euromed, lancé en 1995 à Barcelone, a été voulu et imposé par l’Allemagne ainsi que des pays du nord et de l’est de l’Europe et également par la Commission européenne. Il faut reconnaître que le processus de Barcelone n’a pas répondu aux attentes de la rive sud de la Méditerranée. Processus dénué de toute ambition, s’inscrivant plutôt dans la phase historique de normalisation de la planète, il ne pouvait donc susciter une dynamique susceptible de réduire l’écart entre les deux ensembles.
A cela, s’ajoute l’aggravation du conflit palestino-israélien. En fait, jamais Israël ne s’est montré aussi arrogant et aussi hermétique à la paix. Il est même encouragé dans cette attitude hostile par la passivité, voire la faiblesse de l’Europe à lui imposer un règlement équitable au conflit qui l’oppose au peuple palestinien d’une part, et aux pays arabes, d’autre part. Le processus de Barcelone est devenu, pour tout le monde, un rêve déçu, voire un échec. La cause principale est le résultat d’une absence manifeste d’intérêt du Nord riche à l’égard du Sud en voie de développement. Aucun progrès sensible dans le rapprochement des peuples ou la mise en œuvre d’une stratégie pour réduire le fossé économique et technologique.
Par conséquent, ce n’est pas une prouesse de tirer les conclusions qui s’imposent pour remettre le processus de Barcelone, revu et corrigé, en adéquation avec les exigences de la mondialisation. Cette fois-ci, l’initiative allait venir du président français Sarkozy pour repenser à un nouveau projet qui se situerait dans le prolongement d’Euromed. Initiative qui voulait mettre l’Allemagne devant le fait accompli. L’ère des rivalités entre les vieilles puissances européennes est loin d’être révolu.
C’est d’abord à Toulon, le 7 février 2007 qu’il lança l’idée du projet d’Union méditerranéenne au cours de sa campagne présidentielle. Le 6 mai 2007, soit au soir de sa victoire, il évoqua, « un grand rêve de civilisation », qui serait « un trait d’union entre l’Europe et l’Afrique ». En octobre 2007, à Tanger au Maroc, il exposa les grandes lignes du projet de l’Union méditerranéenne. C’est l’un de ses principaux collaborateurs, Henri Guaino, qui en est l’artisan. Ce dernier le définit ainsi : « Barcelone a été conçu par l’Europe comme un instrument pour dialoguer avec le Sud. Pour la première fois depuis la décolonisation, l’Europe marquait son intérêt pour le Sud. Mais dans Barcelone, il y avait un déséquilibre en faveur du Nord. Barcelone c’était la propriété de l’Europe qui parlait au Sud, lui offrait son aide et quelquefois lui faisait la leçon. L’Union pour la Méditerranée, elle, veut être une copropriété, un partenariat à égalité de droits et devoirs pour assumer ensemble cette part de destinée commune qui s’appelle la Méditerranée.
D’où l’idée de construire non pas l’union de la Méditerranée mais pour la Méditerranée ». (interview accordée au journal Le Monde 12 juillet 2008). Cette vision fait penser au NEPAD qui est présenté, lui aussi, comme un partenariat entre l’Afrique et la communauté internationale des bailleurs de fonds.
Ce n’est pas seulement une nuance de sémantique car l’Union de la Méditerranée, projet initial, a été rejeté par l’Allemagne qui y voyait une scission de l’Europe. D’ailleurs, le 6 décembre 2007, la chancelière allemande, Mme Merkel, mit les pieds dans le plat au cours d’une conférence de presse commune avec le président français, en déclarant : « Si les Etats riverains de la Méditerranée devaient constituer une deuxième union totalement différente, cela risquerait de constituer une épreuve difficile pour l’Europe. » Le message est passé, l’Allemagne obtient gain de cause. Le projet français ne se substituera pas au processus de Barcelone mais aura vocation à le compléter.
Le 3 mars 2008, à Hanovre, la chancelière allemande et le président français trouvent un terrain d’entente : la commission européenne aura son mot à dire sur le dossier euroméditerranéen. Ces péripéties permettent de conclure que le projet n’a pas été mûri de longue date, d’où les divergences entre les Européens eux-mêmes. Une fois de plus, il est permis d’affirmer qu’il ne véhicule aucune vision stratégique et surtout aucun projet d’envergure pour sceller effectivement les destins des deux rives.
En effet, l’on estime que le processus de Barcelone n’a pas tenu ses promesses mais dans le même temps, l’on tente de le ranimer en le mettant sous perfusion avec le projet de l’union pour la Méditerranée. D’ailleurs, il propose un ensemble de projets communs comme la dépollution de la Méditerranée ou les autoroutes de la mer, initiative française qui date de 2003 mais remise au goût du jour.
Hubert Védrine, ancien ministre français des Affaires étrangères, a accepté de renoncer volontairement au langage diplomatique pour dire crûment les choses. Sans aucun détour qui pourrait prêter à confusion, il affirme qui’« il ne faut pas trop attendre de l’Union pour la Méditerranée. La Méditerranée n’existe pas, sinon sur le plan océanographique, ou peut-être agricole. C’est plus un projet en construction. Les institutions ne régleront pas tous les problèmes.
Pour être sincère, il y a plus d’homogénéité entre les Maghrébins eux-mêmes qu’entre ces derniers et les Européens. Les peuples ont beaucoup de points communs comme la langue, la religion... Par contre, les dirigeants politiques n’ont pas réussi à donner vie à l’union du Maghreb arabe, qui n’existe pas d’ailleurs. Les relations sont plus bilatérales. Les pays européens arrivent à surmonter leurs différences, surtout dans les moments de crise. Quand j’étais ministre des Affaires étrangères, je réunissais souvent de manière officieuse les ministres italien et espagnol au Quai d’Orsay pour discuter du Maghreb. On voulait donner l’exemple.
Très vite, les intérêts particuliers prenaient le-dessus. L’Italie ne voulait pas lâcher la Lybie et essayait de grignoter le marché tunisien. L’Espagne de son côté visait le Maroc et lorgnait vers l’ouest de l’Algérie. L’Europe n’arrivait pas à avoir une position commune à 15, imaginez à 27 ! Les hommes d’affaires doivent compter surtout sur eux-mêmes. Il ne faut pas attendre de miracle de l’UPM » (interview accordée au journal El Watan du 20 octobre 2008. Cette prise de position permet de comprendre l’unanimité de façade autour de l’UPM et apporte surtout un éclairage très important aux perspectives d’avenir.

II - L’Algérie face au projet de l’UPM
La question
qui se pose immédiatement est la suivante : pourquoi une telle initiative et quels sont ses desseins inavoués ? La réponse à une telle question permet de comprendre la position de l’Algérie vis-à-vis de l’UPM. Ses réticences initiales, ses hésitations et ses interrogations légitimes expliquent l’évolution de sa décision pour adhérer à un tel projet né dans des conditions difficiles, à cause des divergences européennes et dont le contenu et le destin demeurent incertains.
En fait, l’UPM est un compromis entre le processus de Barcelone, miné par l’échec, et un avenir incertain. Ce constat permet de conclure que l’UE reste figée sur une position invariable concernant ses rapports avec le sud de la Méditerranée.
D’ailleurs, elle ne lui manifeste un regain d’intérêt que lorsque la conjoncture l’exige comme l’atteste le cours des relations internationales : guerre froide, chute du mur de Berlin, mondialisation ...
L’on comprend dès lors les réticences, voire les appréhensions, de l’Algérie vis-à-vis des initiatives de l’UE concernant le flanc sud de la Méditerranée.
Des initiatives imposées, même si elles sont soumises à négociation, qui finissent par aboutir malgré des réserves formulées par les uns et les autres. Il en est ainsi de l’UPM qui a été adoptée par l’ensemble des pays méditerranéens à l’exception de la Libye. Au nom de la realpolitik et de l’avenir, l’Algérie a fini par soutenir l’UPM car, après tout, elle a bien adhéré au processus de Barcelone qui se poursuit sous d’autres formes. Cependant, elle est bien consciente de ses insuffisances comme le montre son détachement vis-à-vis, par exemple, des institutions de l’UPM qui verront le jour.
Elle n’a pas exprimé clairement ses intentions d’abriter une quelconque institution de ce projet commun. Elle assiste médusée à l’âpre bataille engagée par certains pays, à l’instar, par exemple, du Maroc, de la Tunisie et de l’Egypte, pour s’arracher les sièges des instances de l’UPM ou des postes de responsabilité.
Est-ce un signe qu’elle ne parie pas sur l’avenir de ce projet ? Tout l’indique, lorsqu’on analyse les points laissés en suspens par l’UPM. La question palestinienne n’a toujours pas débouché sur la création d’un Etat. Bien au contraire, Israël multiplie les entraves en installant, par exemple, de nouvelles colonies de peuplement. La normalisation avec la Syrie vise plusieurs objectifs essentiels à l’UE. On sollicite ce pays pour persuader l’Iran de renoncer à son programme nucléaire, mais surtout, il est attendu de la Syrie qu’elle contribue à la normalisation de la région, normalisation répondant aux objectifs d’assurer en dernier ressort la sécurité d’Israël.
Pour atteindre cet objectif inavoué, on lui attribue une grande influence sur les groupes armés du Sud Liban pour les amener à renoncer à commettre des actes contre Israël. Mais surtout, et cet objectif intéresse au plus haut point la France, on invite la Syrie à établir officiellement des relations diplomatiques avec le Liban avec ouverture immédiate des ambassades dans les deux pays. Une première dans les relations bilatérales syro-libanaises. C’est chose faite. Ainsi, la Syrie se fait accepter par la communauté internationale, en général et l’UE, en particulier.
Peu de temps avant, elle était mise au ban de ladite communauté et considérée comme un pays « peu fréquentable ». Très vite, elle est rayée de la liste des pays soutenant le terrorisme et très vite, elle redevient « fréquentable » tout en lui laissant miroiter l’espoir, si têtu et si lointain, de récupérer un jour, par la négociation et donc la reconnaissance diplomatique de l’Etat d’Israël, le plateau du Golan.
Le Proche-Orient n’est pas le premier écueil. Il y en a un autre qui tient à la politique de la France vis-à-vis du Maghreb. Il faut reconnaître que sa politique est loin d’être équilibrée pour pouvoir contribuer à l’émergence de l’UMA. En effet, sa politique extérieure repose sur un principe invariable, à savoir l’entêtement à vouloir mettre sur un pied d’égalité les trois pays, surtout le Maroc et l’Algérie, mais avec l’arrière-pensée de pencher plus pour le royaume afin qu’il soit la puissance dominante de la région, avec bien entendu toutes les conséquences que cela implique, y compris pour la sécurité de l’Algérie.
Elle feint d’ignorer que l’Algérie est objectivement la puissance dominante et que, sans elle, l’UMA sera tout simplement une coquille vide, voire même une chimère. C’est en fonction de cette politique qu’elle soutient l’annexion du type colonial du Sahara-Occidental au grand mépris de la légalité internationale et des résolutions des Nations unies. En réalité, la France soutient l’annexion, refuse l’autodétermination du peuple sahraoui et ce, tout simplement, pour permettre au Maroc d’être aussi puissant que l’Algérie dans la région.
C’est cette attitude, complètement surréaliste, qui montre que la France n’a pas tourné la page du passé, qui conforte l’obstination du Maroc et fait reculer chaque fois l’organisation d’un référendum d’autodétermination. Or, le règlement du problème du Sahara-Occidental ouvrirait la voie à la concrétisation de l’UMA et donc à l’émergence d’un Maghreb où régneraient la paix et la sécurité qui sont essentielles au développement.
Ce subterfuge lui permet de masquer beaucoup plus son hostilité à l’Algérie, comme puissance régionale dominante, et à l’organisation d’un référendum d’autodétermination qui finira bien, un jour ou l’autre, par avoir lieu car, on ne peut indéfiniment ramer à contre courant de l’histoire. Après avoir normalisé la situation à l’Est et réussi la réunification allemande, l’UE découvre qu’elle doit relever d’autres défis de la mondialisation entre autres l’irruption de la Chine comme superpuissance, bientôt suivie par l’Inde. Il est donc vital pour l’UE de veiller à préserver le flanc sud de la Méditerranée des appétits de ces deux pays émergents.
Au cours d’un passage à Tunis pour vendre son projet de l’UPM, le président français s’est exclamé en déclarant que le nord et le sud de la Méditerranée, c’est gagnant-gagnant pour contrer la Chine. Rien que cela ! Ainsi, le flanc sud devient vital pour permettre à l’UE de consolider sa position dans la mondialisation. Cependant, l’UE veut atteindre un tel objectif à moindres frais, sans aucune contrepartie puisqu’elle ne met pas en avant un projet conséquent pour le développement économique de cette région.
Or, les pays du sud de la Méditerranée sont en voie de développement et la meilleure façon de les arrimer à l’UE est de contribuer à leur mise à niveau. Ce n’est pas la dépollution de la Méditerranée, projet au demeurant louable mais insuffisant, ou les restrictions à la libre circulation des personnes qui favoriseront le développement économique et technologique de ces pays.
Ceux-ci attendent de l’UE des gestes similaires dont a bénéficié l’Europe de l’Est. Si le flanc sud de la Méditerranée est considéré comme vital pour l’UE non seulement pour faire face aux défis que lui imposent les pays émergents mais aussi l’immigration en provenance du reste de l’Afrique, alors une autre stratégie s’impose. Une stratégie basée sur une vision dénuée de toute arrière-pensée pour favoriser l’éclosion d’un véritable partenariat qui ferait de la Méditerranée une zone de paix, de sécurité et de développement.
A titre d’exemple, la défunte CEE a bien créé, en son temps, la BERD pour financer le développement et la mise à niveau des pays de l’Europe de l’Est.
Le flanc sud atteint toujours la concrétisation d’un projet similaire, pourtant prévu par l’UPM. D’ailleurs, l’un des artisans du projet de l’UPM, en l’occurrence M. Guaino, a bien évoqué toutes les promesses pour le concrétiser : « Mais le but n’est qu’après le 13, tous ceux qui ont un projet de dimension régionale et d’intérêt général, Etats, collectivités, universités, associations, entrepreneurs, scientifiques, artistes, peuvent le réaliser avec le soutien de l’UPM. Je pense à une banque de la Méditerranée, à un centre méditerranéen de la recherche scientifique, à des universités communes, à un Erasmus méditerranéen, à un conservatoire du littoral, à des politiques communes du tourisme, au nucléaire civil, à la réunion des académies de la Méditerranée et à des centaines d’autres projets, grands et petits, qui permettront de tisser des solidarités. » (interview au journal Le Monde du 12 juillet 2008.
Cette déclaration ressemble plutôt à un catalogue de vœux pieux qu’à un projet cohérent dont les objectifs et les moyens sont déterminés avec rigueur. Le seul chiffre avancé dans le cadre de ce projet est le coût de la dépollution de la Méditerranée. L’on est tenté de croire qu’à travers le projet de l’UPM, l’UE vise plutôt des objectifs politiques et non l’émergence d’un partenariat qui mettrait les pays du flanc sud sur la trajectoire du développement et de la mise à niveau économique et technologique dont la finalité est de réduire les écarts entre les deux rives.
C’est ce que révèlent, entre autres, les objectifs de la normalisation de la Syrie, du traitement de la question palestinienne et du dossier du Sahara-Occidental. Cette toile de fond rend aisée la compréhension à la fois des réticences de l’Algérie et finalement de son adhésion à l’UPM. Il faut souligner qu’elle n’a fait aucune concession, elle sait parfaitement qu’elle n’a rien à attendre de plus que quiconque qui en fait partie.
Cette position renforce son rôle de pays pivot dans la région et la prémunit d’ores et déjà des incertitudes de demain. En conclusion, il faut rappeler que l’UPM est le prolongement du processus de Barcelone, certes revu et corrigé, mais toujours sans ambition ni vision rénovée. Le projet s’inscrit donc dans la ligne droite de la politique traditionnelle de l’Europe vis-à-vis du flanc sud de la Méditerranée.
Le regard du Nord sur le Sud n’est pas celui d’un partenaire mais d’un puissant qui fixe les lignes d’horizon. Justement, à force de pratiquer la fuite en avant ou de privilégier les faux-fuyants, l’UE risque de se décrédibiliser et de perdre ainsi sa puissance d’attraction, car, et c’est là l’aspect positif de la mondialisation, le flanc sud de la Méditerranée n’est plus dans la situation de demandeur, contrairement à l’UE qui a besoin d’un espace vital plus vaste pour consolider sa position de pôle mondial compétitif et puissant. La crise mondiale actuelle inflige à l’UE une récession économique au même titre que pour les autres régions du monde. Qu’en sera-t-il du devenir de l’UPM ? Une chose est certaine, après cette crise, le monde ne sera plus comme avant.
Communication faite à l’université de Béjaïa(Faculté de droit) à l’occasion de la journée d’études, le 29 octobre 2008, sur le thème « L’Union pour la Méditerranée »
Par
Dr Salah Mouhoubi - Elwatan.com - novembre 2008

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